Elle était là, attablée sur cette terrasse. L’endroit était paisible, calme, serein. Une brise soufflait, caressait ses boucles auburn, jouant avec sa chevelure. Un tableau paisible auquel rien ne manquait. Rien. Pas même la traditionnelle fontaine, pas même le pommier qui protégeait la terrasse, pas même les oiseaux qui chantaient de douces mélodies.
Alors.. Pourquoi donc ne parvenait-elle pas à se calmer? Pourquoi ses lèvres pincées ne pouvaient-elles sourire?

Ce n’était pourtant pas une femme à problème. N’était-elle pas heureuse? Elle qui aimait les gens, elle qui était aimée des gens... Elle avait tout pour réussir : elle n’était pas laide ni idiote. On le lui faisait souvent remarquer d’ailleurs… Ça… et sa maladresse. On l’aimait, on la choyait… On se moquait d’elle parfois et on la laissait. Elle était quelqu’un de normal en somme. Une fille comme il en existe des centaines, poussée par la réussite, freinée par l’échec. Elle avait la vie facile cette petite demoiselle. Elle venait de découvrir la vie… sans pouvoir la dévorer à pleines dents

C'est que cette jeune femme avait un terrible défaut : elle ne pouvait vivre seule. Non , elle ne parlait pas là d’un amour à la Hollywood. Non… Elle n’avait pas besoin de cette entrave. Elle voulait rester libre, indépendante. Elle ne voulait pas devenir l’une de ces greluches sans cervelle....


Et de toute façon, qui l’aurait aimée, elle, cette fille maladroite et stupide?
Il y en avait des centaines des filles comme elle. Il y en avait des milliers des femmes plus sages, plus intelligentes, plus délicates, plus fines, plus jolies… Plus… Plus… Plus.

Et c’était pourquoi même sous ce soleil, dans ce cadre de rêve, elle ne pouvait être heureuse.
Avait-elle l’air jolie? Non, bien sûr que non, elle devait avoir l’air stupide, seule sur cette terrasse.

Une seule personne ne pouvait discuter avec elle. Elle-même. Seule avec sa conscience, elle ne pouvait converser. Elle ne pouvait se sentir forte.
Elle avait besoin d’être consolée la pauvre folle. Elle avait besoin de quelqu’un l’idiote. Elle devait prouver aux autres qu’elle valait aussi bien qu’eux. Alors, elle continuait sa route, visait toujours plus haut avant de s’écraser. Comme à son habitude.

Non… En fait, elle n’avait rien à prouver aux autres.
Non, elle n’avait d’autres rivaux que cette femme jolie, amusante et intelligente qu’elle retrouvait dans son miroir.
Cette femme qui n’était pas elle mais dont elle n’entendait que trop parler.